Passion et claustration dans Le Coffre et le Revenant et Le Philtre, les deux seules nouvelles espagnoles de Stendhal

- Nicolas ALLARD -


Le Coffre et le Revenant et Le Philtre sont les seules nouvelles de Stendhal dont la matière est essentiellement espagnole. Ces deux récits courts, publiés en mai et juin 1830 dans la Revue de Paris, établissent un lien inextricable entre la notion de claustration et la question de la passion, thèmes centraux chez Stendhal. La prison – réelle mais aussi psychique – est en effet présente dans de nombreux textes de l'écrivain grenoblois, et est régulièrement associée à l'amour. C'est notamment le cas dans Le Rouge et le Noir [1], publié lui aussi en 1830, et plus encore dans La Chartreuse de Parme, qui fait de la prison amoureuse un de ses enjeux les plus forts. Dans Le Coffre et le Revenant et Le Philtre, le rapport des amants à la claustration est absolument essentiel, en ce qu'il est le révélateur de la nature de leur passion.

Le Coffre et le Revenant met en scène le personnage de don Fernando de la Cueva. Sur le point de se marier avec la belle Inès, il est arrêté arbitrairement par le directeur de la police de Grenade, don Blas Bustos y Mosquera. Lors de cet épisode, Fernando ne perd pas seulement sa liberté, mais aussi l'exclusivité de son amour pour Inès : don Blas tombe en effet amoureux de la jeune femme, et décide peu après de la demander en mariage. Si Inès n'est absolument pas encline à épouser l'homme responsable de l'arrestation de Fernando, elle finit toutefois par accepter son offre. Le directeur de police propose en effet un marché au père d'Inès : si sa fille acceptait de l'épouser, il participerait officieusement à la libération de Fernando. Inès supporte donc ce mariage forcé pour libérer l'homme qu'elle aime. Sa passion amoureuse l'amène ainsi à accepter une forme d'emprisonnement dans le mariage. La générosité sacrificielle d'Inès atteint même un degré hyperbolique, lorsqu'elle accepte de renvoyer sa suivante et amie Sancha, afin d'apaiser la jalousie de don Blas, qui ne tolère plus la complicité entre les deux femmes. Inès choisit alors de monnayer son amitié – sa dernière source de joie – contre la libération des détenus de la prison de Torre-Vieja :

Don Bustos entra chez sa femme. « La prison de Torre-Vieja, lui dit-elle, combien contient-elle de prisonniers en ce moment ? - Trente-deux dans les cachots et deux cent soixante, je crois, dans les étages supérieurs. - Donnez-leur la liberté, dit Inès, et je me sépare de la seule amie que j'aie au monde » [2].

Souvent assimilée à la figure de la Vierge pendant la nouvelle, Inès décide donc volontairement de subir une claustration de plus en plus oppressante, et ce, afin d'aider son prochain. Son enfermement progressif est le seul instrument en sa possession lui permettant de défendre sa passion pour Fernando. L'aide salutaire qu'elle apporte aux prisonniers de Torre-Vieja est en effet un renvoi indirect à l'homme qu'elle aime : ne l'a-t-elle pas vu pour la dernière fois alors qu'il était encore prisonnier ?

Après un exil forcé de deux ans à Majorque, Fernando revient à Grenade. Il souhaite d'emblée revoir Inès, même s'il la sait désormais mariée à don Blas. Après avoir retrouvé Sancha, qui travaille désormais pour des contrebandiers, il profite de la présence d'un coffre devant aller au palais de don Blas pour réaliser son souhait :

Elle se hâtait d'arranger ses tulles et ses châles. Don Fernando la regardait faire : tout à coup il se précipite sur le coffre, jette dehors les tulles et les châles, et se met à leur place. - Êtes-vous fou ? dit Sancha effrayée. - Tiens, voici cinquante onces; mais que le ciel m'anéantisse si je sors de ce coffre avant d'être dans le palais de l'Inquisition à Grenade ! Je veux la voir [3]

Fernando choisit donc volontairement d'être enfermé, pendant une longue période et dans un espace qui n'est pas prévu pour recevoir un homme, afin de se donner une chance de revoir Inès. Il accepte l'enfermement comme une épreuve. Cet acte présente, de fait, une dimension héroïque. Fernando annonce déjà le personnage de Fabrice del Dongo qui, dans La Chartreuse de Parme, souhaitera rester prisonnier dans la tour Farnèse, au péril même de sa vie, afin de pouvoir voir chaque jour Clélia Conti, la femme qu'il aime [4]. En choisissant cette claustration, Fernando se présente comme un personnage passionné. Il ne réfléchit absolument pas aux conséquences de cette décision, et n'est que pure spontanéité [5]. Son énergie s'oppose à la raison, son seul souhait étant de répondre favorablement à son désir.

Arrivé dans le palais de don Blas, Fernando verra sa claustration volontaire récompensée par Inès. Alors que la piété de la jeune femme l'incitait d'abord à juger immorale la simple présence de Fernando dans sa chambre, elle finira toutefois par céder à ses avances [6]. Le changement d'attitude d'Inès – a priori peu compréhensible – peut être interprété comme une manière de mettre en valeur l'acte héroïque de Fernando. La claustration du jeune homme peut être en effet perçue comme un moyen de vivre les souffrances qu'elle-même endure au quotidien. Inès est en effet une femme cloîtrée, qui jouit d'une liberté extrêmement limitée. Le palais où elle vit s'apparente à une prison : il s'agit d'un édifice noir, défendu par de nombreux sbires. La claustration volontaire du héros était du reste le seul moyen qui lui était offert de prendre d'assaut cette véritable citadelle :

Don Fernando allait passer des heures entières sur une colline couverte de jeunes lièges. Il voyait, de là, l'ancien palais de l'Inquisition de Grenade, habité maintenant par don Blas et par Inès. Ses yeux ne pouvaient se détacher des murs noircis de ce palais, qui s'élevait comme un géant au milieu des maisons de la ville [7].

Ce palais aux dimensions hyperboliques est également présenté comme une sorte d'enfer terrestre. Outre sa couleur noire, il est décrit comme un espace où règne une chaleur étouffante :

La chaleur était extrême, et la chambre fort obscure. Les persiennes étaient fermées, ainsi que de grands rideaux de la plus légère mousseline des Indes, drapés fort bas [8].

La chaleur était accablante, l'obscurité profonde [9]

Le trajet de Fernando en direction du palais est ainsi une véritable catabase : il descend en effet d'une colline pour rejoindre Inès, passant du soleil à l'ombre du coffre puis du palais. Fernando n'est certes pas Orphée, Inès n'est pas Eurydice, mais il y a indéniablement une dimension héroïque et mythique dans son acte. La claustration se met ainsi au service de la passion. Son acceptation volontaire est signe d'un amour fort et sincère. L'enfermement de Fernando aboutira du reste à une forme de souffrance morale et physique, faisant intervenir le sens étymologique du mot passion [10], puisqu'en quittant le palais de don Blas, il tombera dans un cimetière et se blessera :

Le coffre resta debout sur le parapet; la douleur de don Fernando augmentait. Ne recevant point de réponse de Zanga, il comprit qu'on l'avait abandonné. Quel que pût être le danger, il résolut d'ouvrir le coffre; il fit un mouvement violent qui le précipita dans le cimetière.
Étourdi de sa chute, don Fernando ne reprit connaissance qu'au bout de quelques instants; il voyait les étoiles briller au-dessus de sa tête : la serrure du coffre avait cédé dans la chute, et il se trouva renversé sur la terre nouvellement remuée d'une tombe. Il songea au danger que pouvait courir Inès, cette pensée lui rendit toute sa force.
Son sang coulait, il était fort meurtri; il parvint cependant à se lever, et bientôt après à marcher, il eut quelque peine à escalader le mur du cimetière, et ensuite à gagner le logement de Sancha. En le voyant couvert de sang, Sancha crut qu'il avait été découvert par don Blas [11]

Le fait que Fernando chute sur une tombe « nouvellement remuée » est annonciateur de sa destinée funeste. Le coffre dans lequel il se trouve est déjà son cercueil. La claustration, comme l'indique le titre de la nouvelle (Le Coffre et le Revenant) a de fait partie liée avec l'amour mais aussi voire surtout avec la mort. Elle est un autre moyen de nommer le lien inextricable entre Éros et Thanatos.

La destinée d'Inès s'inscrit dans une lignée similaire à celle de Fernando. En effet, la jeune femme choisit, à la fin de la nouvelle, de se réfugier dans un couvent afin de ne pas être victime de la vengeance de don Blas. Cette nouvelle claustration, qui s'oppose à la claustration matrimoniale qui était la sienne depuis deux ans, a plusieurs valeurs. Si elle a bien sûr une fonction protectrice, don Blas ne pouvant a priori pas entrer dans un couvent, elle est aussi le signe qu'Inès se prépare déjà à la mort. Le couvent n'est jamais un refuge idéal chez Stendhal : tous les personnages féminins qui sont amenés à s'y rendre se détachent en effet peu à peu de la vie [12]. Le couvent est un purgatoire. En devenant religieuse, Inès montre qu'elle ne peut désormais plus vivre de la même façon qu'autrefois, sa séparation avec Fernando apparaissant comme définitive. L'entrée volontaire au couvent sanctifie son amour pour le jeune homme : Inès manifeste ainsi son passage dans un autre monde, dans lequel elle ne pourra plus connaître les plaisirs charnels et terrestres. Son amour de Dieu lui permet de se livrer à une forme d'amour platonique pour don Fernando, la jeune femme ayant eu tendance à confondre les deux amours pendant son mariage, comme elle l'affirmait elle-même à son amant :

Tu veux donc la mort de mon âme immortelle ? lui dit Inès; mais au moins crois une chose, c'est que je t'adore, et que je n'ai jamais aimé que toi. Il ne s'est pas écoulé une minute de l'abominable vie que je mène depuis mon mariage, pendant laquelle je n'aie songé à toi. C'était un péché exécrable : j'ai tout fait pour t'oublier, mais en vain. N'aie pas peur de mon impiété, mon Fernando : le croiras-tu ? Ce saint crucifix que tu vois là, à côté de mon lit, bien souvent ne me présente plus l'image de ce Sauveur qui doit nous juger; il ne me rappelle que les serments que je t'ai faits en étendant la main vers lui dans ma petite chambre d'Alcolote [13].

Inès finira par mourir, « percée de plusieurs coups de poignard [14] ». Sa mort, qui précède de peu celle de Fernando, est là aussi le signe que leur passion ne peut se vivre que dans une forme de claustration. Une claustration ultime : la mort.

Dans Le Philtre, Léonor, une jeune espagnole de dix-neuf ans, est elle aussi mariée à un homme plus âgé qu'elle, don Gutier Ferrandez. Exilée à Bordeaux avec son mari pour des raisons politiques, elle tombe très vite sous le charme d'un écuyer voltigeur du nom de Mayral. À la différence de Liéven et de don Gutier Ferrandez – les deux autres hommes amoureux d'elle – Mayral ne semble pas être habité d'un amour fou pour la jeune femme. Si don Gutier Ferrandez et Liéven se comportent en amants courtois, Mayral n'adopte cette posture qu'au début. Il écrit notamment des lettres à Léonor pour lui signifier la passion qu'il a pour elle. Mais sa passion décroît en réalité assez rapidement.

Mayral semble avoir très mal vécu les deux entrevues avortées avec Léonor. Il devait en effet voir la jeune femme une première fois chez elle, en pleine nuit, à un moment où son mari était absent. Or, don Gutier Ferrandez ayant finalement été de retour plus tôt que prévu, Léonor n'a pas pu recevoir Mayral. Le jeune homme a alors pensé que Léonor lui avait volontairement donné un rendez-vous factice, afin de se jouer de lui. La jeune espagnole parvient toutefois à lui faire entendre raison, mais leur deuxième entrevue se solde elle aussi par un échec.

Le retour imprévu du mari, comique de répétition de nature burlesque, oblige Mayral à rester enfermé pendant plus d'une journée, d'abord dans le cabinet de toilette d'Inès, puis dans le grenier. L'attitude de Mayral pendant cet épisode est révélatrice de ses réels sentiments pour Léonor. Il supporte en effet très mal son enfermement. Non seulement cet enfermement n'est pas souhaité, mais il est ressenti comme un affront. Mayral est furieux d'avoir été obligé d'attendre si longtemps, sans avoir obtenu ce pour quoi il était venu, à savoir les faveurs de Léonor. Contrairement à Fernando, ce n'est donc pas la passion amoureuse qui motive ses actes. Il faut en effet rappeler que Mayral se trouve enfermé dans le cabinet de toilette de Léonor, c'est-à-dire dans l'espace qui est le plus intime à la jeune femme. Il pourrait donc éprouver un certain plaisir – presque sexuel – à se trouver dans ce lieu-corps, d'autant qu'il n'est pas totalement seul puisque Léonor lui parle à travers la porte :

Mayral passa dans mon cabinet de toilette; mais don Gutier n'était revenu chez lui que pour prendre des papiers essentiels. Par malheur, il avait aussi un sac de portugaises. La paresse le prit de descendre à sa caisse, il entra dans mon cabinet, mit son or dans une de mes armoires qu'il ferma à clef, et, pour surcroît de précaution, comme il est fort méfiant, il prit aussi la clef du cabinet. Jugez de mon chagrin : Mayral était furieux, je ne pus que lui parler un peu à travers la porte [15].

Contrairement à Fabrice del Dongo, qui dans La Chartreuse de Parme jouit du seul plaisir de pouvoir communiquer par lettres avec Clélia Conti, Mayral n'éprouve aucune joie à se trouver seul avec Léonor. Il ne souhaite pas lui parler, mais simplement la posséder. Cet épisode de claustration est particulièrement révélateur des intentions du jeune voltigeur, comme l'indique d'ailleurs son départ. En effet, après que Léonor a trouvé un moyen de le faire s'échapper, il brise de rage un miroir avec son poignard :

Enfin, sans avoir pu parler une seule minute avec Mayral, je fus trop heureuse de pouvoir donner des commissions à tous les portefaix, et trouver le moment de le faire sauver par le jardin. En passant, il brisa avec le manche de son poignard la grande glace du salon. Il était furieux [16]

Cette attitude, mélange de violence et d'ingratitude, souligne bien que, littéralement, cet épisode de claustration a permis à Mayral de « briser la glace ». L'expression se trouve régulièrement employée chez Stendhal, notamment dans Le Rouge et le Noir, avec le sens que nous lui connaissons aujourd'hui. On sait désormais qui est vraiment Mayral, ou du moins quelles sont ses intentions à l'égard de Léonor. Il semble justement qu'il n'ait d'autre ambition que d'assouvir son orgueil. Le terme est du reste employé par Léonor à la fin de son récit :

Mon mari est toujours amoureux de moi; plusieurs fois dans cette journée, il me donna quelques baisers et me prit dans ses bras. Mayral, malade d'orgueil plus que d'amour, se figura que je ne l'avais caché que pour le rendre témoin de ces transports.
Il ne répondait plus à mes lettres, il ne daignait pas même me regarder au spectacle [17].

Mayral, qui croit que Léonor a voulu se jouer de lui, se place systématiquement dans un rapport de dominant-dominé. N'ayant pas d'argent, et étant d'une condition très modeste, il semble vouloir prendre sa revanche sur des nantis qu'il admire et hait tout à la fois, en possédant la femme de l'un d'eux. Mayral voudrait ainsi prouver que, malgré ses richesses, don Gutier Ferrandez ne lui serait pas supérieur. Léonor ne serait donc ici qu'un terrain de conquête, dans une sorte de guerre des classes avant l'heure. Le fait que Mayral décide de vendre littéralement la jeune femme à des individus de basse condition à la fin du récit, est le signe qu'il place ses rapports avec elle non pas sous l'angle de la passion, mais de l'orgueil. Il rejoue ainsi à son avantage la scène de leur premier rendez-vous nocturne avorté, comme il l'affirme à l'un de ses complices : « Elle a voulu, dans les temps, se moquer de moi : je me moquerai d'elle [18]. ». Parmi les trois hommes du Philtre, seul Mayral n'est donc pas amoureux de Léonor. Il n'est pas un être passionné, dans le sens où sa passion est feinte et ne sert que son orgueil et son ambition de revanche. Or, dès lors que la passion est le fruit d'une réflexion, et qu'elle est monnayée, elle cesse d'être vraiment une passion. La souffrance de Léonor – et des autres personnages – vient du fait qu'elle aime le seul homme qui ne l'aime pas.

Le destin de la jeune espagnole sera semblable à celui d'Inès. Alors que le lieutenant Liéven la demande en mariage, rendant possible une happy end qui existe dans la version de Scarron dont Stendhal s'est inspiré [19], Léonor refuse de l'épouser, mettant en avant le fait qu'elle aime encore Mayral : « - Mais si je rencontre Mayral, je me sens assez folle et criminelle pour vous abandonner, vous mon bienfaiteur, et tomber à ses pieds [20]. ». Le texte se termine sur une ellipse – comme souvent dans les nouvelles stendhaliennes – et ne donne aucune explication satisfaisante concernant la décision de Léonor de partir vivre elle aussi dans un couvent : « Léonor a fait profession au couvent des Ursulines [21]. ». Devenir religieuse est sans doute un choix par défaut : la jeune espagnole, considérant qu'elle a définitivement perdu l'amour de Mayral, se détache des contingences humaines. Elle meurt tout à la fois et à l'amour et à la vie. Sa passion aboutit donc à une nouvelle claustration, étape là aussi transitoire vers la mort.

Dans ces deux nouvelles espagnoles, la passion ne peut donc se comprendre qu'en lien avec la notion de claustration. Le rapport de Fernando et Mayral à l'enfermement est signe de la nature réelle de leur passion pour leurs deux amantes. Si d'un côté, la claustration volontaire de Fernando, en étant une tentative de revivre les souffrances de la femme aimée, est un acte amoureux héroïque, elle est dans l'autre nouvelle vécue comme une obligation intolérable, et souligne l'orgueil du personnage. Le dénouement de ces nouvelles confirmera la différence du rapport à la passion : si Fernando va au bout de son sacrifice personnel, en étant finalement exécuté par amour, Mayral disparaîtra à jamais de la vie de Léonor, emmenant avec lui une nouvelle maîtresse.


NOTES

[1] Le personnage de Julien Sorel se trouve en effet régulièrement enfermé dans des pièces de la maison des Rênal, et ce, afin de pouvoir donner libre cours à sa relation adultérine. La claustration volontaire est un stratagème qui permet aux deux amants de se voir à maintes reprises, sans avoir à trop éveiller les soupçons du mari. La passion de Julien pour Madame de Rênal le conduira réellement en prison, à la fin du récit, après sa tentative avortée d'assassiner son ancienne amante.

[2] Stendhal, Le Coffre et le Revenant, dans Œuvres romanesques complètes, tome I, Paris, Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 2005, p. 278.

[3] Ibid., p. 282.

[4] Lors de sa correspondance avec la duchesse Sanseverina, Fabrice affirmera notamment : « je ne veux pas me sauver; je veux mourir ici ! », dans La Chartreuse de Parme, Orléans, Paradigme, 2007, p. 331.

[5] Il « se précipite » en effet littéralement sur le coffre et, par son acte, suscite la stupeur de Sancha (« Êtes-vous fou ? »).

[6] « Elle courut à une sonnette, mais don Fernando y fut avant elle et la serra dans ses bras. Don Fernando était tremblant; Inès s'en aperçut fort bien, et perdit toute la force qu'elle prenait dans sa colère. Don Fernando ne se laissa plus dominer par les pensées d'amour et de volupté, et fut tout à son devoir. Il était plus tremblant qu'Inès, car il sentait qu'il venait d'agir envers elle comme un ennemi; mais il ne trouva ni colère ni emportement. », Stendhal, Le Coffre et le Revenant, op. cit., p. 284. Comme souvent chez Stendhal, les relations charnelles sont gazées. Une première version de ce passage était nettement plus explicite : « fut tout à son devoir et après une lutte de quelques minutes, Inès fut à lui. »

[7] Ibid., p. 279.

[8] Ibid., p. 282.

[9] Ibid., p. 283.

[10] Du latin patior, qui signifie notamment « souffrir ».

[11] Stendhal, Le Coffre et le Revenant, op. cit., p. 287-288.

[12] C'est notamment le cas de Hélène de Campireali, dans L'Abbesse de Castro, revenant au couvent après la mort supposée de son amant, Jules Branciforte : « Elle revint donc tristement au couvent de Castro, et l'on pourrait terminer ici son histoire : ce serait bien pour elle, et peut-être aussi pour le lecteur. Nous allons, en effet, assister à la longue dégradation d'une âme noble et généreuse. Les mesures prudentes et les mensonges de la civilisation, qui désormais vont l'obséder de toutes parts, remplaceront les mouvements sincères des passions énergiques et naturelles. » dans Chroniques italiennes, Paris, Folio classique, 1973, p. 179.

[13] Stendhal, Le Coffre et le Revenant, op. cit., p. 284.

[14] Ibid., p. 292.

[15] Stendhal, Le Philtre, dans Œuvres romanesques complètes, tome I, Paris, Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 2005, p. 342.

[16] Ibid., p. 343.

[17] Idem.

[18] Ibid., p. 345.

[19] Dans L'Adultère innocent de Paul Scarron, nouvelle du XVIIe siècle elle-même traduite d'une nouvelle espagnole de Maria de Zayas y Sotomayor, Al fin se paga todo (À la fin tout se paye, 1647), le dénouement est effectivement heureux : le jeune homme et l'héroïne se marient.

[20] Stendhal, Le Philtre, op. cit., p. 346.

[21] Idem.


POUR CITER CET ARTICLE

Nicolas Allard, « Passion et claustration dans Le Coffre et le Revenant et Le Philtre, les deux seules nouvelles espagnoles de Stendhal  », Les Cahiers du Ceracc, nº 8, 2015 [en ligne]. URL : http://www.cahiers-ceracc.fr/allard.html [Site consulté le DATE].

Dans Le Coffre et le Revenant et Le Philtre, les deux seules nouvelles de Stendhal dont la matière est essentiellement espagnole, s'établit un lien inextricable entre la notion de claustration et la question de la passion. Ces deux thèmes ont une importance de premier ordre dans l'économie de ces deux récits courts, publiés en 1830 dans la Revue de Paris. Le rapport des amants à la claustration est en effet une des clés majeures de la compréhension de ces textes, en ce qu'il est révélateur de la véritable nature de leur passion. Si la passion opère comme moteur narratif, la claustration, quant à elle, oriente la destinée des personnages vers un dénouement tragique, caractéristique des récits courts stendhaliens.

Agrégé de Lettres modernes, Nicolas ALLARD est professeur en classe préparatoire à Orléans et membre du jury du CAPES. Il travaille sur le récit court stendhalien, sous la direction de Paolo Tortonese. On lui doit notamment un article sur les notions d'anges et de démons dans Le Coffre et le Revenant de Stendhal (L'Année stendhalienne n°13).











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