Les pièces monologales contemporaines : discours de l’enfermement et parole libératrice

- Agnès CAMBIER -


« Je ressasse. / Je ressasserai. / Tu ressasseras. / Il ressassera. / Nous ressasserons. / Vous ressasserez. / Ils ressasseront [1]. » Cette litanie, tirée de la pièce pour un personnage Je rien Te deum de Fabrice Melquiot, résume de façon minimaliste une idée commune au sujet du monologue, vu comme un discours replié sur lui-même, condamné à « tourner en rond », à l’image de son locuteur. Florence Fix écrit ainsi que « dans les pièces strictement monologales, où la parole solitaire ne rencontre ni interlocuteur ni allocutaire, la parole ressassée n’échappe pas au cercle de l’enfermement [2] ». Or ces pièces monologales, que nous définissons comme des textes écrits pour un(e) comédien(ne) seul(e) en scène donnant voix à un personnage unique, connaissent un essor fulgurant depuis près de quarante ans. Poussant à son paroxysme ce que Jean-Pierre Sarrazac nomme le « kaléidoscope des modes dramatique, épique et lyrique [3] », propre à beaucoup d’écritures dramatiques contemporaines, cette forme confirme, par son développement frappant, l’annonce de Bernard Dort en 1980 : « Le temps du dialogue […] est, bel et bien, passé. Celui des monologues est venu [4]. »

Est-ce à dire qu’en accueillant ces nombreuses paroles solitaires, les scènes théâtrales d’aujourd’hui font entendre des discours de l’enfermement ? Peut-être, à considérer d’une part la récurrence des situations de claustration physique, et de l’autre l’emmurement psychique qui s’y exprime souvent. Pourtant, ces logorrhées de reclus sont aussi l’occasion de plusieurs libérations : celle des mots trop longtemps étouffés dans l’esprit torturé des personnages, mais aussi celle de la forme dramatique, dont le carcan formel est brisé par l’hybridité générique qui caractérise ces textes. Enfin, la dualité clôture / ouverture se joue également au niveau énonciatif : si le monologue apparaît souvent comme un discours refermé sur lui-même, il est aussi un espace privilégié de communication avec le public puisque, récusant la clôture de l’univers fictionnel, il brise un mur symbolique : le quatrième. Un corpus d’une quinzaine de pièces monologales de langue française, écrites de 1977 à 2009, nous permettra d’aborder ces visages paradoxaux de l’enfermement, en envisageant d’abord celui-ci dans ses aspects physiques, puis psychiques, et enfin énonciatifs.


Entre quatre murs


Tout d’abord, la fréquence des lieux clos dans ces monologues est, à elle seule, révélatrice d’un lien entre cette forme et la thématique de l’enfermement. Nous pouvons relever la prison dans laquelle se trouve le personnage du Sas de Michel Azama, qui dit « hurler dans sa boîte de pierres [5] », tout comme celui de Hyènes de Christian Siméon qui, s’adressant tout au long de la pièce au spectateur, accuse le silence de celui-ci de contribuer à sa claustration : « Le ciel me manque. J’étouffe ici. Entre ces quatre murs. Sous ces pierres. Un avant-goût de quoi ? Un avant-goût de rien. Du silence. Ton silence. Entre ces quatre murs les gravats de mon existence [6]. » L’écho sonore lie cette « existence » en sursis du condamné à mort fictionnel au « silence » de ses auditeurs réels.

Le centre de rétention pour immigrés clandestins, dans Le Testament de Vanda de Jean-Pierre Siméon, est également un lieu de réclusion, tout comme l’asile psychiatrique dans Le Dit de Jésus-Marie-Joseph d’Enzo Cormann. Le locuteur de ce dernier monologue est d’ailleurs né dans une prison où était incarcérée sa mère ; tissant des liens entre ces deux espaces, il évoque « le ciment sale du mur de la cellule [7] » de son enfance et interroge : « Est-ce qu’un bébé est à sa place dans une prison [8] ? » Cette question est adressée à son psychiatre Barnet, dont il dit : « Barnet croit que peindre me soigne. Il ne sait pas le nom de ma maladie. Quand je le lui demande, il dit qu’on ne doit pas enfermer la vie dans des noms de choses. Il m’enferme dans l’hôpital, parce que je ne sais pas quel est mon nom [9]. » Le polyptote sur le verbe « enfermer » est significatif de la logique faussée du médecin, qui refuse la clôture par le langage mais préconise d’enclore physiquement un être justement incapable de se nommer.

La Séparation des songes de Jean Delabroy, inspiré de l’affaire Natacha Kampusch, évoque pour sa part la cave où une jeune fille a été séquestrée pendant huit ans ; celle-ci décrit ainsi les premiers moments de sa réclusion :

Et j’ai disparu
Il faut croire
Je ne me suis plus vue plus entendue plus sentie
Quelquefois si grande était mon inexistence
Je me souviens
Ça devait être au début
Que je me suis encore écorché les mains sur les parpaings pour sentir quelque chose
Tapé les quatre murs pour avoir mal
Avoir conscience de quelque chose dans quelqu’un qui avait mal
Et qui
Moi
Avais à comploter contre ses murs
À les séduire
Pour qu’ils laissent passer pour qu’ils conduisent au-dehors [10].

La dissociation de la personnalité, conséquence de l’enfermement physique prolongé, apparaît à travers la construction pronominale « je ne me suis plus vue » dans laquelle la locutrice est à la fois sujet et objet, le passage à la troisième personne avec l’indéfini « quelqu’un » et surtout l’isolement du pronom tonique « Moi », qui ramène la première personne fuyante (on attendrait « quelqu’un qui avait mal / Et qui [avait] à comploter contre ses murs »). Retrouver cette identité oubliée sera tout l’enjeu du monologue, qui se termine sur les mots « Moi et pas une autre / Moi / Moi / Moi / Rien que moi [11] ». Les espaces clos semblent donc avoir des affinités évidentes avec la parole solitaire, que ces lieux soient quotidiens (une salle de bains chez Roland Fichet, une sanisette chez Koffi Kwahulé) ou sortent de l’ordinaire, comme le tombeau de sel de Sodome ma douce de Laurent Gaudé, dont le personnage prend la parole après des millénaires d’engloutissement, ou encore le World Trade Center en flammes dans lequel se trouve le locuteur de Je rien Te deum de Fabrice Melquiot, qui évoque également les passagers de l’avion détourné, dont les « ongles » « crissent » « sur les parois », « comme au toit du cercueil paniquent les enterrés vifs [12]. »

Cette récurrence de la claustration physique appelle cependant deux nuances. D’une part, l’enfermement peut être vu comme une protection plutôt que comme une contrainte : ainsi, le personnage de La Chute de l’ange rebelle de Roland Fichet vit volontairement reclus dans sa salle de bains et celui d’Exécuteur 14 d’Adel Hakim tente d’échapper à la guerre civile en se terrant dans son appartement. Ce dernier décrit ainsi sa situation : « J’étais enfermé chez moi, pestiféré, out, exclu, coupé du reste [13]. » ; mais c’est la condition de sa survie : « Alors il fallait se protéger : tu fermes tous les trous du mur par où la mort peut passer [14]. » Même la prison de Hyènes est parfois présentée comme un havre car ce monologue se déroule dans le Paris de 1832, entre émeutes et choléra ; le condamné à mort déclare alors « moi je riais bien à l’abri dans ma prison. […] Le danger est de l’autre côté du mur [15] ».

D’autre part, les espaces clos sont souvent des lieux transitoires, comme l’indique le titre de la pièce Le Sas, dont la locutrice est dans « la cellule des partantes [16] » la veille de sa libération de prison. Cet espace est caractéristique de ces lieux de l’entre-deux, à l’image des chambres d’hôtel de La Nuit juste avant les forêts de Bernard-Marie Koltès, dont le locuteur affirme « je vis à l’hôtel depuis presque toujours, je dis : chez moi par habitude, mais c’est l’hôtel [17] ». Ces zones de transit peuvent alors symboliser l’incapacité des personnages à trouver leur place dans un monde avec lequel tout lien a été coupé. Si la claustration physique est donc propice au jaillissement de la parole solitaire car elle isole le personnage et le prive d’action, c’est souvent dans un entre-deux que surgit le monologue : il peut s’agir d’une transition entre l’enfermement et la liberté (notamment pour la jeune fille séquestrée qui évoque la cave dont elle vient de s’échapper alors que ses pensées habitent encore cet espace, ou pour l’habitante de Sodome chez Laurent Gaudé, qui affirme « je reviens à la vie [18] » au moment où la pluie la lave du sel qui avait fait d’elle une statue) ou bien d’une transition entre l’enfermement et la mort (par exemple pour le condamné de Hyènes à la veille de son exécution, ou le personnage de Je rien Te deum qui s’échappe miraculeusement de la première tour du World Trade Center grâce à un fil tendu entre les deux gratte-ciel, mais atteint la seconde tour au moment où surgit « Un autre avion sur Manhattan [19] »). Le « sas d’attente » du « centre de rétention [20] » dans Le Testament de Vanda de Jean-Pierre Siméon est typique de ces lieux transitoires : dernier espace avant la mort car la locutrice s’y suicide, il succède à une autre prison symbolique, l’errance de cette sans-abri apatride dans les rues de Paris, évoquées ainsi : « à force de marcher dans les rues / on doit avoir la couleur des rues / la couleur de peau des rues et / l’ombre des murs dans la peau [21] ». La triple répétition du mot « rues » et son écho sonore inversé dans les « murs » du vers suivant traduisent poétiquement l’enfermement dans un univers inhospitalier.

De tels lieux favorisent bien sûr le jaillissement des mots trop longtemps retenus par le personnage ; ainsi Vanda commence-t-elle son monologue, adressé à son bébé, par cet avertissement :

attention je vais commencer à parler je
vais parler cette fois oui ça
va venir ça va être d’un coup
faudra pas m’arrêter Belette pas
de cris pas de pleurs rien j’ai
tu j’ai tout tu tout le temps
pour toi Belette j’ai fait ça j’ai
su taire fait l’effort affreux
souvent j’ai mis le poing dans la bouche
mais je vais commencer à parler et
comment ça s’arrête ? ça s’arrête pas
s’arrêtera pas comment arrêter toi
que tu pleures quand tu veux rien que boire ?
ça s’arrête pas ça s’arrêtera avec
moi ma vie avec ma vie c’est bientôt [22].

La logorrhée, désignée à six reprises par le pronom « ça » – dont on sait les liens qu’il entretient avec le refoulé –, permettra à la jeune femme de s’évader intérieurement malgré sa détention physique ; la parole est alors hors les murs, voyageant à travers le temps comme les lieux. Il en va de même pour chacun de ces récits de vie, dans lesquels le souvenir crée un espace de liberté, même et surtout quand le personnage est reclus, comme dans Le Sas :

Chaque jour fini dès le matin quand je le barre sur mon calendrier.
J’en connais le manque de surprise, le peu de goût à voir tourner les heures, j’attends avec terreur le moment entre le dernier merle et la première étoile où la nuit vient dans la cellule.
Vite, vite se réciter des poèmes, se tenir des conversations à soi toute seule. Je prends mon élan et hop, je suis loin en arrière, un bain de mer avec toi, on roule sur le sable [23].

Cette femme s’évade également hors d’elle-même en donnant voix à d’autres, à travers un monologue fortement polyphonique ; évoquant notamment ses compagnes de cellule, la prisonnière adopte alors une posture de témoin, parlant à la fois en son nom propre et au nom d’une collectivité dont elle a partagé les souffrances.

Telle est aussi la position ambiguë du locuteur de Je rien Te deum, qui semble échapper à l’ici et maintenant de l’attentat new-yorkais ; selon Françoise Heulot-Petit, « le personnage est dans l’événement, mais il s’en soustrait, oscillant entre l’histoire en train de s’écrire et un monde de pensées aux limites du monde [24] ». Il se fait prophète en annonçant, pendant l’effondrement du World Trade Center, qu’« il y aura une guerre qui sera la guerre, la guerre des séparations et des amalgames, la guerre du sang religieux contre le sang religieux [25] » ; sa parole, toujours d’après les termes de Françoise Heulot-Petit, « semble issue d’un entre-deux et revenir de chez les morts pour hanter les vivants [26] ». Ainsi, cette voix qui récite la litanie des noms des victimes échappe aux limites du corps du personnage et à sa situation de mort imminente pour devenir celle d’un témoin hors du temps et hors des tours, dont la parole testamentaire et testimoniale entretient la mémoire de la catastrophe. La claustration physique peut donc engendrer le discours monologal, qui permet en retour au reclus d’échapper à son enfermement. Mais celui-ci ne touche pas seulement le corps, car c’est bien souvent l’esprit des personnages qui est sous contrainte.


Les murs intérieurs


En effet, des liens existent de longue date entre monologue et folie, en premier lieu parce que dans la vie réelle, celui qui parle seul est souvent perçu comme fou ; Jakobson écrit ainsi qu’« il n’y a pas d’émetteur sans receveur – sauf, bien entendu, quand l’émetteur est un ivrogne ou un malade mental [27] ». La logorrhée solitaire est donc une forme d’expression privilégiée des personnages qui perdent la raison, notamment, comme le rappelle Françoise Poulet dans son étude du « monologue de l’extravagant » au XVIIe siècle, parce que l’« accusation d’invraisemblance ne saurait concerner la parole du fou, parole délirante qui crée son espace imaginaire propre, indépendamment des modalités de discours ordinaires [28] ». Ces « parole[s] délirante[s] » se sont multipliées dans le théâtre moderne, jusqu’à l’essor de ces pièces monologales à l’issue d’une période marquée, selon Jean-Pierre Sarrazac, par « le triomphe ambigu – c’est-à-dire la chute imminente – d’un “sujet” parvenu au comble de la solitude et de l’autarcie [29] ».

Parmi les situations d’enfermement psychique, la monomanie a la part belle. Le personnage de La Chute de l’ange rebelle de Roland Fichet a ainsi d’étranges activités (« Rompre un grain de riz : obsédante idée fixe à laquelle je me suis soumis toute la journée, j’en suis tout moulu [30]. ») et des dégoûts non moins obsessionnels :

Les savons de couleur provoquent chez moi un soulèvement de cœur que l’odeur de violette ou de rose qui accompagne toujours le savon de couleur accentue ; c’est intenable et mon cœur ne redescend que de longues heures plus tard, de longues heures plus tard … C’est le seul cadeau que mes sœurs m’envoient, je ne reçois rien d’elles, aucune nouvelle, sauf le jour de mon anniversaire ces savons à l’offensante couleur, ces savons à l’odeur affolante, déchirante. Pris en étau entre le besoin de sentir sur ma peau par le truchement de ces savons le souvenir (oh ! le souvenir !) de mes sœurs et la nausée que ne manquent jamais de provoquer cette couleur et cette odeur je subis une torture mousseuse. Qu’un savon puisse me torturer montre assez que j’ai franchi les bornes du petit monde révolté que je croyais habiter [31].

Les jeux sur les sonorités de cette prose poétique (notamment les assonances et allitérations en [œr] et [ãt]), de même que le ressassement du mot « savon(s) », font entendre une langue de l’obsession, emprisonnant le personnage autant qu’elle dit sa prison mentale. Le locuteur de Mickey-la-Torche de Natacha de Pontcharra est lui aussi captif d’une idée fixe, qu’il désigne comme une « idée tordue débarquée chez [lui] en idée simple » ; il conserve les déchets issus des poubelles de sa voisine, selon une méthode immuable : « je coupe la tête [du sac poubelle] aux ciseaux, je vide à l’évier, je rince au jet, je sèche et je date [32]. » La manie de la collection se marie alors à la fascination pour l’ordure et au voyeurisme : « La première fois, je voulais juste voir une fois dans son ordure. Crever sa petite boule bleue c’était comme entailler une lucarne dans son mur à mon seul usage, mais lucarne après lucarne tout le mur y a passé, petit sac après petit sac, c’est une baie vitrée qui s’est ouverte. Plus j’entassais, plus j’empilais et plus c’était clair, ce mur d’ordures faisait de la transparence, chaque détritus la déshabillait jusqu’à plus nu [33]. » Les répétitions, l’adverbe « plus » en anaphore révèlent ici le cercle vicieux dans lequel s’est enfermé le locuteur.

Un traumatisme indicible peut également emmurer les personnages en eux-mêmes. C’est le cas, bien sûr, de la séquestration dans La Séparation des songes, dont la locutrice désavoue les mots attendus par les médias : « Sois maudit sois maudit sois maudit / Est-ce que c’est bien la litanie / Ce que je devais dire dans le micro / Mais s’il vous plaît taisez-vous [34] ». Sa propre mise en mots se fera par tâtonnements, pour sortir de l’ombre une réalité inimaginable, au sens propre. Le viol est paradigmatique de ce type de traumatismes, notamment les viols collectifs lors de guerres civiles, racontés par la victime dans Le Testament de Vanda ou par celui qui a assisté au martyre puis au meurtre de sa petite amie dans Exécuteur 14 et qui, après ce jour, n’a plus pensé qu’à « tuer, pour effacer… le sang là-bas [35] ». Dans Jaz de Koffi Kwahulé, le viol commis dans une sanisette étouffe tant la personnalité de la victime qu’elle ne parvient pas à le raconter à la première personne ; elle le fait donc à la troisième, ce qui lui permet d’objectiver les faits subis. Ainsi, son récit est ponctué par la phrase « Je ne suis pas ici pour parler de moi mais de Jaz [36] » et c’est seulement à la fin de son monologue qu’elle parviendra à passer de la phrase initiale « On l’a toujours appelée Jaz [37] » à « On m’a toujours appelée Jaz [38] ».

Cette difficulté à extérioriser un traumatisme peut conduire à une dangereuse confusion de pensées ; ainsi, le personnage du Petit Bois d’Eugène Durif, incapable d’objectiver la mort accidentelle de sa petite sœur Clara survenue des années auparavant, étrangle une femme alors que ses obsessions liées à l’enfant disparue l’envahissent au point de lui faire perdre toute lucidité :

Après, ce fut la nuit vraiment et le noir, j’ai serré, je crois, oui serré, j’ai jeté ma pensée très loin pour que rien n’arrive, j’ai senti que cela s’éloignait de moi, un poids trop lourd. Des secondes, des minutes, des heures, un temps interminable et juste un éclair, le souffle qui s’en va, une lumière jamais vue, un râle à la tremblée. […] Je me suis vu marcher avec Clara nos mains collées l’une à l’autre, tellement qu’elles laissaient des marques l’une sur l’autre. Des ombres nous ouvraient la route, très grandes, nous étions rassurés et n’avions plus peur de la vieille qui déterre les mulots pour garder leur tête et éloigner le mauvais sort […]. Et j’entendais la voix de Clara, un langage incompréhensible, mais c’était bien sa voix rayonnante et douce. Pour chaque mot, on avait l’impression qu’elle changeait de langue, et c’était une vraie musique, inconnue, inouïe. Ce que mes mains peuvent faire en dehors de moi, je l’ignore. Je l’ai serrée tout contre moi et ce fut la nuit vraiment, mes mains autour de son cou [39].

Si le récit du meurtre est ainsi tressé avec des souvenirs d’enfance, ceux-ci n’expriment pourtant jamais l’essentiel, car on ne saura pas comment est morte la fillette ; or c’est précisément ce caractère indicible qui étouffe le personnage, prisonnier de ce « poids trop lourd » dont il ne parvient pas à se libérer par les mots. L’expression « j’ai jeté ma pensée très loin », leitmotiv du monologue, est une fuite plus qu’une libération, car elle exprime un état d’inconscience qui est aussi une prison intérieure.

La perception faussée de la réalité est ainsi une autre forme d’aliénation mentale. Elle touche notamment ceux qui commettent des meurtres sans comprendre ni même parfois se souvenir de leur geste . C’est le cas, nous venons de le voir, dans Le Petit Bois mais aussi dans La Chute de l’ange rebelle, où le matricide n’est peut-être qu’un fantasme, et dans Hyènes, qui ne permet jamais de savoir si le personnage a vraiment commis les assassinats pour lesquels il est condamné ; lui-même reconnaît « Je ne comprends rien, tu sais. / J’essaye mais je ne comprends rien [40] » et il alterne les déclarations « j’ai tué [41] », « je n’ai tué personne [42] », « je suis innocent [43] », « je suis coupable [44] »… Il s’ensuit un vertige permanent pour le spectateur, comme dans Credo d’Enzo Cormann, où l’on est sans cesse conduit à reconsidérer la situation. Le début de la pièce laisse penser que la locutrice s’adresse vraiment à son compagnon bien qu’il ne soit pas représenté sur scène ; elle lui sert à dîner, disant « Tu ferais bien de boire, je te dis. Tu me comprendrais mieux. Bois et mange. / Pendant ce temps, je parlerai [45]. » Puis on croit qu’elle l’a assassiné mais lui parle comme s’il était encore vivant, car elle déclare « hier soir, je t’ai tué [46] » et raconte longuement comment elle en est venue à ce geste meurtrier. Enfin, on comprend qu’elle a imaginé l’existence de cet homme aussi bien que sa mise à mort : « Jamais tu ne t’es assis à cette table, n’est-ce pas ? Et jamais tu n’as bu ni mangé ce que, chaque soir je t’ai cependant préparé. Tu n’es bien sûr qu’une sorte de rêve avec, certaines fois, de la lumière vraie. (Un temps.) Je suis seule. Je l’ai toujours été [47]. »

Or cette indétermination touche aussi la forme même des pièces, car l’ébranlement psychique des personnages trouve un écho dans l’ébranlement générique qui caractérise ces textes au croisement du théâtre, du récit et de la poésie. Marie-Hélène Boblet écrit ainsi, à propos du Pays lointain de Lagarce, que « le métissage [générique] coïncide avec la perturbation des fonctions psychiques [48] », ce qui rejoint l’affirmation de Christophe Triau et Françoise Dubor au sujet des monologues fumistes de la fin du XIXe siècle : pour eux, l’incertitude générique est « liée à une incertitude sur la question du locuteur comme sujet singulier [49] ». De telles analyses pourraient parfaitement concerner nos pièces monologales, dont les locuteurs ne peuvent être enclos dans des catégories hermétiques – la fragilité de l’identité rejoignant là, par la négative, la problématique de l’enfermement. Ainsi, même le sexe (ou plutôt le genre-gender) du personnage de La Chute de l’ange rebelle n’est pas nettement établi, pas plus que sa pathologie psychiatrique ; lui-même commente : « Ils diront inceste, schizophrénie, perversion, ou je ne sais quoi, ils seront loin de la vérité [50] ». À l’image de ce personnage qui ne peut être enfermé dans un cadre identifiable par la société, ces monologues ne se laissent pas circonscrire dans un genre unique, car la parole de leurs locuteurs transgressant les normes morales brise elle-même le carcan de la forme dramatique.


Le quatrième mur mis à bas


Corps prisonniers et esprits emmurés sont donc récurrents dans ces textes, mais ceux-ci sont paradoxalement des formes libres, échappant à tout cadre générique. La réclusion semble ainsi pouvoir aller de pair avec l’émancipation, tout comme un discours apparemment clos peut se révéler parole d’ouverture à l’autre. En effet, si nous abordons l’enfermement non plus comme motif thématique mais en tant que composante structurelle, il apparaît de prime abord que le monologue est, comme nous l’avons vu dès l’introduction, un discours replié sur lui-même. L’absence de dialogue prive le personnage de l’échange intersubjectif qui est au fondement de toute relation sociale comme du genre dramatique ; ne pouvant se construire par la confrontation à l’autre, la parole semble alors vouée à tourner sur elle-même.

L’importance des leitmotive dans de nombreuses pièces en est un signe ; nous pouvons citer à titre d’exemple, dans Le Dit de Jésus-Marie-Joseph d’Enzo Cormann, les répétitions / variations du motif « je peins le visage de maman [51] », « J’ai l’idée de peindre le visage de maman avec des yeux rouges [52]. », « je peins les yeux de maman [53] », « J’essaye de peindre le visage de maman avec des yeux plus grands que la bouche [54]. », etc. Ce texte est construit sur une logique plus musicale que dramatique : l’entrelacement des thèmes suit les méandres de la pensée du personnage dont le médecin dit qu’il « mélange tout [55] », comme le font également le locuteur du Petit Bois et bien d’autres ; ainsi, pour Florence Fix, le monologue « instaure les processus mouvants de la mémoire revancharde à la place de la chronologie dramaturgique habituelle [56] ».

Le paradigme de ces discours revenant sans cesse sur eux-mêmes nous est donné par La Nuit juste avant les forêts, composé d’une longue phrase de cinquante-sept pages sans un seul point. Jouant, de l’aveu de Koltès, sur des retours de thèmes à la manière d’une fugue de Bach, cette logorrhée ne cesse de se répéter tout en allant toujours de l’avant. Les motifs du coin de la rue où marchait l’inconnu à qui s’adresse le soliloque, de la pluie, de la chambre, des forêts et bien d’autres le parcourent pour se rejoindre dans un final où tout semble définitivement confondu :

quel bordel, les airs d’opéra, les femmes, la terre froide, la fille en chemise de nuit, les putes et les cimetières, et je cours je ne me sens plus, je cherche quelque chose qui soit comme de l’herbe au milieu de ce fouillis, les colombes s’envolent au-dessus de la forêt et les soldats les tirent, les raqués font la manche, les loubards sapés font la chasse aux ratons, je cours, je cours, je cours, je rêve du chant secret des Arabes entre eux, camarade, je te trouve et je te tiens le bras, j’ai tant envie d’une chambre et je suis tout mouillé, mama mama mama, ne dis rien, ne bouge pas, je te regarde, je t’aime, camarade, camarade, moi, j’ai cherché quelqu’un qui soit comme un ange au milieu de ce bordel, et tu es là, je t’aime, et le reste, de la bière, de la bière, et je ne sais toujours pas comment je pourrais le dire, quel fouillis, quel bordel, camarade, et puis toujours la pluie, la pluie, la pluie, la pluie [57].

Tous les motifs sont réunis dans un ultime ressassement, alors que les mots « je ne sais toujours pas comment je pourrais le dire, quel fouillis, quel bordel » semblent définir le monologue entier, marquant dans un même mouvement l’échec communicationnel du personnage et la réussite magistrale de l’auteur.

Pourtant, ces discours repliés sur eux-mêmes sont peut-être les formes les plus ouvertes à la communication réelle dans l’espace du théâtre ; tel est le point de vue de Hans-Thies Lehmann qui, après avoir noté que « les différents modes de monologue, l’apostrophe du public et la performance solo ont en commun le recul de l’axe intra-scénique au profit de l’axe-theatron [58] », engage les réflexions suivantes :

On trouve assez couramment l’assertion selon laquelle le monologue exprimerait la solitude, une incapacité amplifiée à la communication, voire une “communication perturbée”, ou encore une aliénation interpersonnelle. Du point de vue de l’esthétique théâtrale, ou pourrait plutôt affirmer qu’au contraire, c’est seulement dans le système dialogué que l’on peut faire reconnaître l’échec de la parole en tant que communication entre les êtres, alors qu’un monologue comme discours qui a le public comme destinataire, augmente l’intensité de la communication – à savoir de celle qui fonctionne dans l’ici et maintenant au théâtre. À l’inverse, on pourrait dire d’un théâtre qui se retire, dans le sens où l’entend Szondi, de manière absolue derrière le quatrième mur et qui laisse libre cours à la communication dialoguée, bien huilée, qu’il entrave la communication dans le théâtre [59].

Ces propos, certes provocateurs, opèrent un changement de perspective très stimulant ; peut-on, en effet, parler d’un discours de l’enfermement au sujet d’une forme qui brise un mur – le quatrième – et récuse une clôture – celle de l’univers fictionnel ? De fait, même en l’absence d’adresse explicite au spectateur, un monologue a toujours le public pour destinataire. C’est aussi le cas, bien sûr, du théâtre dialogué, en vertu de la double énonciation ; mais l’absence d’interlocuteur scénique et le jeu plus ou moins frontal qui en découle font du spectateur d’un monologue un récepteur bien moins passif que le public d’une dramaturgie classique. En outre, un certain nombre de pièces jouent sur des glissements entre adresse interne (visant un interlocuteur absent) et adresse externe (destinée au public) [60].

Ainsi, Le Testament de Vanda, en recourant à l’artifice du couffin censé abriter un bébé, donne au personnage un interlocuteur incapable de lui répondre ; le public se substitue alors à l’enfant auquel s’adresse le soliloque. C’est le cas également dans La Nuit juste avant les forêts : puisque l’interlocuteur n’est pas représenté sur scène (on peut d’ailleurs envisager qu’il n’existe que dans l’imagination du personnage), c’est le spectateur qui reçoit de façon directe une apostrophe comme « je t’aime, camarade ». D’autres adresses sont ambiguës et tendent vers une implication toujours croissante du spectateur ; ainsi, la locutrice de La Séparation des songes semble parler aux policiers ou aux journalistes mais c’est le public lui-même, dans son rôle de voyeur, qui est pris à partie à travers des phrases comme « Détournez vos yeux / Votre œil qui pleure / Votre œil qui fouille [61] » ou, vers la fin, « Allez partez maintenant / Je vous en prie / Partez [62] ».

Adel Hakim va plus loin dans Exécuteur 14, avec une énonciation centrée sur un « tu » qui peut toujours être perçu comme une adresse du locuteur à lui-même, si l’on veut maintenir l’illusion d’une clôture fictionnelle, mais qui est aussi manifestement une adresse au public, notamment quand le personnage interroge : « Imagine. Où peut mener l’extrême [63] ? » Le spectateur n’est plus alors seulement pris à partie, comme il l’est par exemple par la femme de Sodome chez Laurent Gaudé, qui provoque le public (« Je suis là, / Regardez. / Je suis belle. / Je vous tente [64] ? ») ; il devient aussi partie prenante, témoin des faits évoqués. Ainsi la victime du l’attentat de Je rien Te deum déclare « Je vous donne mes yeux, prenez-les [65]. » et s’exclame « Je t’appelle au secours [66] ! » .

Le condamné de Hyènes interpelle quant à lui le public avec violence : « Alors bouge ! Parle ! Fais quelque chose ! Dis-moi quelque chose ! Insulte-moi ! Crache-moi dessus ! […] Alors quoi ? Pas l’aumône d’une phrase ? Pas un mot ? Pas un geste ? Rien ? Ordure [67]. » Cette rupture radicale du quatrième mur a pour but d’impliquer le spectateur dans une relation personnelle avec ce personnage pourtant fictif, afin de faire de lui le dépositaire d’une mémoire souffrante :

Et ce soir il n’y a qu’une seule vérité, on me tuera demain et tu ne feras rien contre cela. Et chaque mot prononcé n’a eu qu’un but, me faire prendre chair dans ta mémoire parce que je crois que peut-être ce lien si ténu que j’ai voulu tresser entre nous, ces minutes que nous avons partagées, cette simple reconnaissance d’un être humain par un autre être humain peut te rendre mon exécution insupportable. Je te demande pardon d’avoir ainsi plombé ton souvenir. Je m’achève et me prolonge en toi. Tu n’es plus un spectateur [68].

La mise sur le même plan, à travers les termes « un être humain » et « un autre être humain », de ces figures appartenant à des univers de référence en principe distincts n’a pas seulement pour effet de faire échapper le personnage à la fiction ; elle bouleverse par là-même le statut du spectateur, engagé personnellement à déchirer le cocon – ou le carcan – par lequel il se croyait abrité du monde dans son fauteuil de théâtre.

Ainsi, souvent associées à la claustration en raison de la solitude qu’elles mettent en scène, les pièces monologales contemporaines présentent diverses situations d’enfermement, de la détention carcérale à la réclusion volontaire ; les espaces clos, souvent transitoires, sont en effet propices au jaillissement d’une parole libératrice. Mais le discours porte aussi les traces de l’emmurement psychique des personnages, qu’ils soient obsédés par des idées fixes, étouffés par un traumatisme indicible ou perturbés dans leur perception de la réalité ; cet ébranlement mental trouve alors un écho dans l’ébranlement générique qui permet à ces textes de s’émanciper des cadres de la forme dramatique. En définitive, si le monologue apparaît de prime abord comme un discours replié sur lui-même, c’est aussi la forme par excellence qui brise les frontières séparant le texte fictionnel de son récepteur réel en réunissant les deux espaces de la scène et de la salle.

Le diseur se trouve alors dans une posture de récitant ou de conteur, réunissant, le temps de la représentation, une communauté constituée, selon les mots d’Enzo Cormann, de ces « gens [qui] font le choix de venir entendre une parole dépouillée de tout artifice qui leur est simplement adressée [69] ». Aussi solitaires que soient les voix qui monologuent ainsi, elles sont destinées à une mise en commun ; loin de ne manifester que le repliement sur soi, ces textes s’ouvrent au contraire à l’autre en partageant un témoignage avec une assemblée qui en sera dépositaire. L’expérience de l’enfermement et de la solitude devient alors, par la mise en voix, celle de la libération de la parole devant la communauté ; celui qui s’y exprime est, selon la belle formule de Laurent Terzieff, « seul avec tous [70] ».


NOTES

[1] Fabrice Melquiot, Exeat. Je Rien Te deum, Paris, L’Arche, 2005, p. 64.

[2] Florence Fix, « Avant-propos », dans Florence Fix et Frédérique Toudoire-Surlapierre (dir.), Le Monologue au théâtre (1950-2000). La parole solitaire, Dijon, Éditions Universitaires de Dijon, coll. « Écritures », 2006, p. 9.

[3] Jean-Pierre Sarrazac, L’Avenir du drame. Écritures dramatiques contemporaines, Lausanne, Éditions de l’Aire, 1981, rééd. Belfort, Circé, coll. « Penser le théâtre », 1999, p. 197.

[4] Bernard Dort, « Le temps des monologues », Le Monde, 25 mai 1980, p. XVIII.

[5] Michel Azama, Le Sas, L’Avant-scène théâtre, 1989, rééd. dans Le Sas. Bled. Vie et mort de Pier Paolo Paosolini, Paris, Éditions Théâtrales, 1993, p. 10.

[6] Christian Siméon, Hyènes suivi de Radeaux, L’Avant-scène théâtre, « collection des quatre-vents », 2010, p. 31.

[7] Enzo Cormann, « Le Dit de Jésus-Marie-Joseph », dans Petites pièces d’auteurs, Paris, Éditions Théâtrales, 1998, p. 41.

[8] Ibid., p. 51.

[9] Ibid., p. 47.

[10] Jean Delabroy, La Séparation des songes, Paris, Théâtre Ouvert / Tapuscrit, 2008, p. 30-31.

[11] Ibid., p. 83.

[12] Fabrice Melquiot, op. cit., p. 55.

[13] Adel Hakim, Exécuteur 14, Éditions de l’Aube, 1996, rééd. L’Avant-Scène théâtre, « collection des quatre-vents », 2005, p. 31.

[14] Ibid., p. 33.

[15] Christian Siméon, op. cit., p. 39.

[16] Michel Azama, op. cit., p. 10.

[17] Bernard-Marie Koltès, La Nuit juste avant les forêts, Paris, Stock, 1980, rééd. Paris, Minuit, 1988, p. 8-9.

[18] Laurent Gaudé, Sodome, ma douce, Arles, Actes Sud – Papiers, 2009, p. 7.

[19] Fabrice Melquiot, op. cit., p. 84.

[20] Jean-Pierre Siméon, Le Testament de Vanda, Besançon, Les Solitaires intempestifs, 2009, p. 11.

[21] Ibid., p. 26.

[22] Ibid., p. 13.

[23] Michel Azama, op. cit., p. 22.

[24] Françoise Heulot-Petit, « Le monologue pour parler du 11 septembre 2001. Le drame de la parole issue du disparu », dans Bertrand Gervais et Patrick Tillard (dir.), Fictions et images du 11 septembre, Figura, n° 24, Montréal, UQÀM, 2010, p. 156.

[25] Fabrice Melquiot, op. cit., p. 74.

[26] Ibid., p. 154.

[27] Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, trad. Nicolas Ruwet, Paris, Minuit, coll. « Arguments », 1963, p. 32.

[28] Françoise Poulet, « Le monologue de l’extravagant : de l’impossible dialogue à la recréation d’un échange oblique “raisonnable” », dans Françoise Dubor et Christophe Triau (dir.), Monologuer. Pratiques du discours solitaire au théâtre, La Licorne, n° 85, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2009, p. 93.

[29] Jean-Pierre Sarrazac, Théâtres intimes, Arles, Actes Sud, coll. « Le temps du théâtre », 1989, p. 11.

[30] Roland Fichet, La Chute de l’ange rebelle, Paris, Éditions Théâtrales, 1990, p. 27.

[31] Ibid., p. 29.

[32] Natacha de Pontcharra, Mickey-la-Torche, Chambéry, Comp’Act, 1993, rééd. dans Mickey-la-Torche. Dancing. L’Enfer c’est un paradis qui brûle, Montreuil, Les Impressions nouvelles, 2004, p. 15.

[33] Ibid., p. 16.

[34] Jean Delabroy, op. cit., p. 13.

[35] Adel Hakim, op. cit., p. 40.

[36] Koffi Kwahulé, Jaz, Paris, Éditions Théâtrales, 1998, rééd. dans Le Sas. Jaz. André. Monologues pour femmes, Éditions Théâtrales, 2007, p. 33, 51, 60.

[37] Ibid., p. 33.

[38] Ibid., p. 65.

[39]Eugène Durif, Le Petit Bois, Chambéry, Comp’Act, 1990, rééd. dans Le Petit Bois suivi de Le Fredon des taiseux, Arles, Actes Sud – Papiers, 2010, p. 25.

[40] Christian Siméon, op. cit., p. 45.

[41] Ibid., p. 40.

[42] Ibid., p. 42.

[43] Ibid., p. 47.

[44] Idem.

[45] Enzo Cormann, Credo suivi de Le Rôdeur, Paris, Minuit, 1982, p. 16.

[46] Ibid., p. 22.

[47] Ibid., p. 40-41.

[48] Marie-Hélène Boblet, « L’hybridité générique du théâtre de Lagarce », Poétique, n° 156, 2008/4, p. 429.

[49] « Avant-Propos », dans Christophe Triau et Françoise Dubor (dir.), op. cit., p. 12.

[50] Roland Fichet, op. cit., p. 24.

[51] Enzo Cormann, op. cit., p. 41.

[52] Ibid., p. 46.

[53] Ibid., p. 48.

[54] Ibid., p. 53.

[55] Ibid., p. 51.

[56] Florence Fix, op. cit., p. 11.

[57] Bernard-Marie Koltès, op. cit., p. 62-63.

[58] Hans-Thies Lehmann, Le Théâtre postdramatique, trad. Philippe-Henri Ledru, Paris, L’Arche, 2002, p. 205.

[59] Ibid., p. 207-208.

[60] Cf. Françoise Heulot et Catherine Naugrette, article « Adresse », dans Jean-Pierre Sarrazac (dir.), Lexique du drame moderne et contemporain, Belval, Circé, 2005, p. 30.

[61] Jean Delabroy, op. cit., p. 62.

[62] Ibid., p. 75.

[63] Adel Hakim, op. cit., p. 55.

[64] Adel Hakim, op. cit., p. 55.

[65] Fabrice Melquiot, op. cit., p. 70.

[66] Ibid., p. 68.

[67] Christian Siméon, op. cit., p. 31.

[68] Ibid., p. 53-54.

[69] Propos recueillis par Sabrina Weldman, « La parole des auteurs », dans Alternatives théâtrales, n° 45, juin 1994, p. 49.

[70] Laurent Terzieff, Seul avec tous, Paris, Presses de la Renaissance, 2010.


POUR CITER CET ARTICLE

Agnès Cambier, « Les pièces monologales contemporaines : discours de l’enfermement et parole libératrice », Les Cahiers du Ceracc, nº 8, 2015 [en ligne]. URL : http://www.cahiers-ceracc.fr/cambier.html [Site consulté le DATE].

Les pièces monologales, en plein essor depuis près de quarante ans, oscillent entre enfermement et libération. Les lieux clos, souvent transitoires, y favorisent la parole solitaire qui, en retour, affranchit le personnage. Ce dernier est emmuré psychiquement par des idées fixes, des traumatismes ou une perception faussée du réel ; mais à cet ébranlement fait écho l’ébranlement générique de ces textes s’émancipant des cadres de la forme dramatique. Enfin, si le monologue semble un discours replié sur lui-même, il permet une communication renforcée avec le spectateur en brisant le quatrième mur ; l’expérience solitaire de l’enfermement devient alors libération de la parole devant la communauté.

Agrégée de Lettres Modernes et doctorante contractuelle à l’université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, Agnès CAMBIER prépare, sous la direction de Jeanyves Guérin et Marie-Hélène Boblet, une thèse de littérature française intitulée « Les pièces monologales contemporaines : des textes pour la voix au croisement des genres ». Outre des articles et communications issus de cette recherche en cours, elle a publié sur Annie Saumont, sur La Chute de Camus ainsi que sur le traitement de la Shoah dans la littérature pour la jeunesse. Par ailleurs, elle met en scène des spectacles unissant théâtre, musique et danse.











Partager